Post séance par circourielle 2025

PY sur le plan religieux j’avais quelques lumières sur la contre-réforme et la naissance de l’ordre des jésuites ( entre parenthèses, les bases de l’ordre et donc du fer de lance de la contre réforme que traduira le baroque surtout italien ..)  ont été posées au collège saint barbe au 4 rue Valette.. coïncidence quand tu nous tiens !  )

Emmanuel : le bâtiment du collège Ste Barbe est non seulement le lieu de création de l’ordre des jésuites en 1539 mais a une autre plaque dans une ruelle (impasse Chartrière) derrière le collège indiquant que c’est le lieu d’un ancien collège où Joachim du Bellay et Ronsard se sont formés sous l’égide de leur maître Dorat férus de connaissance antique et ont décidé de consolider la langue française par le manifeste sur La défense de la langue française en 1549, dix ans après l’ordonnance de Villers-Cotterêts (et donc la fondation de l’ordre des jésuites). Je reconnais que tout cela fait beaucoup de coïncidences, on parle de Genius Loci !

La France prend alors le virage de la Renaissance mais ne prendra pas ensuite le virage du baroque avec la contre-réforme préférant le gallicanisme (je crois qu’en plus les jésuites sont expulsés plusieurs fois de France à cause de cela), la défense de la nation et du français. D’ou le style classique de l’architecture française pendant la période baroque sauf quelques églises de l’ordre des jésuites même si la musique elle en France est considérée comme baroque (Rameau).

D’ou le fait que le français est une langue normée et contrôlée par l’académie française. Or, l’oulipo va trouver son inspiration notamment chez les poètes dits grands rhétoriqueurs antérieurs à Villers-cotterêts beaucoup plus joueurs (pas enfermés dans des formes strictes comme le sonnet avec la Renaissance), équivalents des troubadours dans le nord de la France notamment, alors que l’Etat français est encore en gestation. Plusieurs questions se posent : Peut-on dire que l’oulipo est une approche baroque de la littérature ? dans ce cas l’oudropo,, serait peut-être une approche baroque du droit critiquant l’approche classique du jardin à la française (plan en deux parties, summa divisio etc.) ? Ce qui se verrait notamment dans le souci de prendre en compte les émotions et une raison entremêlée et peut-être dans notre projet de nouvelle carte du droit ? Cela pourrait aussi expliquer une certaine résistance française à des thèmes baroques comme la simulation, le simulacre, les deepfakes, etc. Mais là il y a un noeud : est-ce que l’oudropo,, ne ferait pas le jeu du baroque et donc d’une culture européenne et non gallicane ? Ce pourrait d’ailleurs-être un choix intéressant, mais il vaudrait mieux que nous en soyons conscients. Ou alors est-ce l’époque qui est baroque, l’oudropo,, surfant sur la vague ? Je trouve une référence sur le baroque et la France un peu ambigüe car peut-être chauvine mais qui fait réfléchir :  v. LE BAROQUE, LA FRANCE ET L’EUROPE Par Bernard Chédozeau, Séance du 12/02/2007, Bulletin n°38, pp. 25-33 (édition 2008) ; Le refus du baroque en France au XVIIe siècle, Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, Bernard Chédozeau, 2007 3 : « Mais tout change après les années 1630. Le baroque est alors ressenti comme lié aux deux grands adversaires : à l’Espagne, qui ne sera vaincue qu’au milieu du XVIIe siècle, et surtout au Saint-Siège. Richelieu puis Louis XIV mènent une politique d’affirmation nationale et étatique qui vient à bout de l’Espagne et qui, dans le domaine religieux mais aussi à des fins politiques, réaffirme les maximes gallicanes de la vieille Ecole de Paris. Cette politique d’indépendance politique face à l’Espagne et de relative autonomie religieuse face à Rome prend en art la forme du refus du baroque, de l’art « italien » jugé décadent par rapport au classicisme de la Renaissance ; la France lui oppose progressivement le retour aux valeurs et aux règles classiques, dans un « retour à l’antique » qui fait du séjour des artistes à Rome un véritable déchirement : s’ils admirent l’antique, « l’art italien », c’est-à-dire baroque, les consterne. Il y a ainsi beaucoup de cohérence dans les caractéristiques de la culture française en face de la vision cléricale et baroque du Saint-Siège et de l’Espagne ; l’affirmation des valeurs classiques est indissociable d’un nouveau surgissement politique de la France. Mais cette affirmation est très originale par rapport à ce qui se fait en Angleterre ou en Espagne. Dans ces pays, une nouvelle identité se fait autour d’un idéal d’empire universel qui s’étend au-delà des mers ; en France cette nouvelle identité se fait autour d’un idéal de la nation, puis de la patrie. L’idée fondamentale est que les valeurs prônées par la nation France ne sont pas meilleures parce qu’elles sont françaises, mais parce qu’elles s’appuient sur la « raison » qui leur confère un caractère d’universalité et d’éternité : à l’idéal universel de l’Angleterre ou de l’Espagne, et à l’idéal catholique et universel du Saint-Siège, s’oppose peu à peu un idéal qui se veut tout aussi universel, mais parce que fondé sur les lois de la raison, areligieux et bientôt laïque. Ces affirmations fondent pour plusieurs siècles non seulement le refus mais le mépris du baroque et de ses valeurs plus affectives, sensibles, populaires. Il faut bien voir que pour la France, refuser le baroque c’est refuser les pouvoirs pontifical et espagnol et adopter en Europe une identité très originale. La France a refusé l’évolution vers le baroque, mais elle reste catholique. Elle prétend qu’on peut être catholique comme le veut le concile de Trente, mais sans l’être à la mode baroque. On peut le vérifier rapidement à propos de deux points majeurs, la Présence réelle dans l’Eucharistie, d’une part, et de l’autre le rôle reconnu au laïc : les positions françaises ne sont pas celles du monde baroque. Pour l’affirmation de la Présence réelle, l’Eglise de France réorganise toutes ses églises en les dotant d’un autel à tabernacle orné de retables, de gloires et de baldaquins. Mais à la différence de ce qui se passe dans le baroque méditerranéen, cette ornementation s’en tient à l’essentiel, et elle ne se développe pas dans d’immenses retables comme en Espagne. Tridentinisation (un rapport avec la contrainte du trident ???), c’est-à-dire réforme catholique de l’Eglise, n’est pas synonyme de baroquisation. Sur un autre plan, l’Eglise de France facilite une participation plus étroite du laïc à la dévotion en autorisant l’accès à la lecture des textes sacrés, bibliques et liturgiques ; l’Eglise baroque ultramontaine interdit expressément cet accès aux textes – l’Espagne et l’Italie n’auront de traduction de la Bible qu’à la veille de la Révolution française -, et elle interprète les demandes tridentines en un sens plutôt sensible et affectif, appuyé sur l’imagination et le cœur. C’est pourquoi en France on ridiculise ce qu’on appelle les « outrances » et les « excès » de l’art et de la dévotion baroques. Ainsi les deux Eglises – s’il est permis de les opposer- acceptent toutes deux la tridentinisation, mais en donnent une formulation différente. C’est cette Eglise propre à la France qui est contemporaine de ce qu’on appelle le classicisme. Le catholicisme ultramontain s’identifie plutôt aux tendances profondes de l’art baroque dont il se sent consubstantiel ; et le gallicanisme religieux manifeste à l’égard du Saint-Siège une hostilité qui au fil des décennies deviendra anticléricale, puis antireligieuse ; à terme se profile la laïcité « à la française »… En France, les opposants au baroque ne sont autres que les adversaires de l’Europe : c’est un tir de barrage nourri par l’extrême gauche, par les communistes, mais aussi, et pour d’autres raisons, par la droite nationaliste ; comme exemple pour les communistes, on peut retenir Roger Vailland. Si beaucoup d’opposants s’opposent aux aspects catholiques de l’entreprise, les patriotes s’inquiètent de la définition de la nation ou de la patrie qu’impliquerait la reconnaissance du baroque: accepter le baroque, n’est-ce pas à nouveau communier dans une identité européenne noyant la patrie? N’est-ce pas accepter des options méditerranéennes et catholiques ? Peut-on favoriser la renaissance honnie ou méprisée d’un sud latin ? Et ne risque-t-on pas de ruiner la spécificité française, si laborieusement définie à travers les valeurs classiques nées du refus du baroque au XVIIe siècle et peu compatibles avec la notion d’un baroque encore souvent tenu pour « décadent » ? La reconnaissance des valeurs européennes d’un interculturel baroque ne risque-t-elle pas de faire parcourir au pays le chemin inverse de celui qui a bâti nation et patrie ? Et que deviennent les valeurs de la mesure et du bon goût, du classicisme éternel ? A la coupole ultramontaine, ne faut-il pas préférer le clocher gaulois ? Pour ces opposants, reconnaître les valeurs du baroque témoigne alors, en plein XXe siècle, moins d’une vocation européenne que d’un regrettable effritement du sens patriotique. En ce sens, on peut même se demander si, loin de porter l’idée de l’Europe comme l’ont peut-être espéré ses promoteurs, la redécouverte du baroque n’a pas été en France un des éléments qui ont empêché la naissance d’une Europe autre que commerciale ; les démons hérités d’un passé finalement trop proche ont sans cesse agité les spectres de jadis par rapport auxquels et contre lesquels la France avait défini sa culture. Face aux européens prisonniers de ce passé, la gauche et la droite l’emporteront : le baroque a été long à se laver des suspicions politiques qui l’ont entouré à sa renaissance, comme elles l’avaient entouré à son apparition. On n’est pas surpris des diverses directions prises par ses adversaires, qui ou bien le nient, ou le neutralisent en le coupant de ses aspects religieux ou en n’y voyant que la résurgence de ce qu’on appelle péjorativement un asianisme éternel. Bref, que ce soit au XVIIe ou au XXe siècles, la perspective baroque a voulu renforcer les liens de la France avec un univers sud-européen dont l’identité française s’est toujours soigneusement distinguée ; et à chaque fois les plus vives oppositions se sont manifestées. Le baroque est une des pierres de touche permettant de définir la conception que chaque citoyen se fait de ses relations à la France et des relations de la France avec les pays du sud, ou avec l’Europe du Nord. Le baroque est un facteur constitutif de l’analyse géopolitique. Comme à leurs débuts, l’art et la culture « baroques », qui ont des aspects totalitaires en ce qu’ils prétendent donner tout son sens à la vie de l’homme – il n’y a pas d’« art pour l’art » dans la pensée baroque, qui est le monde du sérieux religieux -, sont au XXe siècle un lieu d’expression des grands choix politiques et religieux. A ce titre, ils soulèvent la question de l’interculturel et à coup sûr celle de la possibilité d’écrire une histoire européenne commune. Le regard porté sur le baroque par un italien, un espagnol, un bavarois, sera profondément différent de celui que portera un français ; et cette différence repose sur des valeurs politiques et religieuses toujours profondes. On voit à quel point un français patriote a toutes les raisons de se méfier du baroque, parce que reconnaître à la France une place dans l’empire baroque revient à ne voir dans l’art français de cette époque qu’un modeste rameau d’un art ailleurs admirablement productif ; parce que c’est aller contre l’histoire, qui a défini l’identité française contre ce baroque; parce que c’est s’exposer à altérer la pureté, l’autonomie et la prééminence du « classicisme » français, et, dans le pire des cas, ne voir en lui, avec certains critiques actuels, qu’une forme extrême du baroque. Mais aujourd’hui l’« impérialisme » des valeurs classiques ne s’exerce plus guère… ».