Intuition
Par Nathalie Dion
DEFINITION :
L’intuition peut être définie (négativement) comme une « forme de connaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement (comprendre par intuition) » (Dictionnaire Le Robert illustré, v° Intuition). De grands choix, de grandes recherches, de grandes découvertes se sont réalisées grâce à l’intuition. Lors de périodes de repos, de rêves, de promenades « créatives », il semblerait que le cerveau reste « attentif » (dans une sorte d’état modifié de conscience) et…que jaillisse parfois une solution (ou une reformulation plus claire d’un problème donné). Albert Einstein a souligné l’importance de l’intuition : « Le mental intuitif est un don sacré, et le mental rationnel un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don » (source internet). La fulgurance intuitive s’imposerait ainsi comme une évidence, donnant accès à « plus grand que soi ».
APPLICATION :
Selon l’article 4 du C. civ., si la loi est muette (absente), obscure, insuffisante, le juge doit en combler les lacunes, en éclaircir le sens, et statuer ; sinon il se rend coupable d’un “déni de justice” (ce qui équivaut à une reconnaissance implicite du pouvoir du juge de créer le droit lorsque cela est nécessaire à la solution du litige…).
L’article 4 C. civ. « Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice »
DEVIENT (en supprimant les mots « silence et insuffisance de la loi » en raison de la densification et de l’accélération des textes de lois à l’époque contemporaine) :
« Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité, ou de l’insuffisance de la loi ou de la complexification du droit, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. Afin de trancher le litige, il lui est possible de compléter le raisonnement juridique par le recours à l’intuition ».
COMMENTAIRE :
Aujourd’hui, la complexification du droit est devenue telle que, dans la plupart des affaires, des arguments sérieux peuvent être et sont effectivement présentés par les deux parties. Comment le juge agit-il en pratique dans ce cas de figure ? Lorsqu’il hésite sur la solution, le recours à l’intuition l’aiderait-il à affiner, à ajuster son application, son interprétation du droit ? Par exemple, il peut parcourir un nombre important de textes et d’ouvrages juridiques en se livrant à une sorte d’évaluation intuitive de l’information, en « sentant » et en sélectionnant celle qui lui paraît la plus adéquate, pertinente, ou la plus en « résonance » avec le problème juridique considéré. Puis, ce travail de lecture mûrit, sédimente, et le juge (ou le chercheur) effectue une synthèse mentale qui le mène vers une solution. Serait-il alors judicieux d’autoriser formellement le juge à allier connaissance « intuitive » et raisonnement juridique, le perceptif (l’intelligence perceptive) et le spéculatif (l’intelligence spéculative) ?